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Journal d'un écolo
Journal d'un écolo
10 avril 2011

Le massacre de la forêt

 

Si nous pouvions nous projeter en arrière dans le temps, dans l’Europe centrale et de l’Ouest de l’an 500 de notre ère, et voler à quelques dizaines de mètres au-dessus du continent, cette vision d’ensemble révèlerait un territoire recouvert à perte de vue de forêt dense seulement interrompue par quelques clairières. Dans chacune de ces zones non boisées, il serait peut-être possible de distinguer un groupe de huttes blotties les unes contre les autres et la fumée de quelques feux de bois s’élevant vers le ciel.

Les Européens de l’an 500 avaient adopté un mode de consommation d’énergie essentiellement tourné vers le bois. C’était le matériau de base dans la construction de leur maison et de leur meubles, ils en faisaient des outils : araires, pompes, rouets, presses à vin mais aussi des véhicules (attelages et bateaux) ; il l’utilisaient en outre comme combustible pour chauffer leur habitation et cuisiner[…]

Si le bois était d’une grande utilité, il était de surcroît abondant. Une vaste forêt s’étendait aux alentours de pratiquement chaque ville ou village […] La forêt tempérées des chênes d’Europe abritait par ailleurs une profusion de gibier, tel le cerf, le sanglier et nombre d’espèces d’oiseaux comme le faisan ou la perdrix. Les communautés humaines étaient petites […] la population de l’Europe ne culminait pas au-delà de 25 millions d’individus, en comparaison des 600 millions actuels en incluant la Russie Européenne.

La vénération des anciens Européens pour la forêt est attestée par leur tradition tenant certains lieux pour sacrés, par leur rituel d’offrandes et de sacrifices dédiés aux arbres et par leurs croyances très élaborées que ces derniers abritaient des esprits.

Toutefois, avec l’avènement du christianisme, ces anciens réflexes païens […] durent céder la place à l’idée que le monde sauvage est fondamentalement perdu et corrompu, qu’il ne peut regagner ses titres de noblesse que par le pieux travail de l’homme. Loin de craindre la surexploitation des forêt, les Européens des temps médiévaux plus avancés considéraient le déboisement comme un devoir chrétien. Abattre les arbres était synonyme d’avancé face au chaos, de domestication de la nature et de préparation du terrain pour la civilisation […]

Dans son ensemble, le mode de consommation d’énergie au Moyen-Âge, basé essentiellement sur le bois, l’eau, le vent mais aussi la force animale et humaine, dépendait de ressources renouvelables mais pas inépuisables. Les forêts de chênes pouvaient se régénérer, même si cela prenait du temps. Or les arbres étaient abattus pus vite qu’ils ne repoussaient : la conséquence fut une déplétion rapide de la principale source d’énergie de l’Europe médiévale. Bien que la construction d navire toujours plus nombreux, toujours plus grands, ainsi que l’invention du haut fourneau aient contribué à l’accélération de l’abattage des forêt, la cause principale de ce phénomène était simplement l’accroissement démographique : beaucoup de forêts furent rasées uniquement pour libérer de l’espace destiné à l’augmentation des cultures alimentant animaux et hommes […] D’un point de vue écologique, l’Europe était saturée en êtres humains, ces dernier imposant de telles contraintes à l’environnement que son écosystème de forêt tempérée subissait une destruction accélérée. Désormais, toute nouvelle augmentation de population ne pouvait reposer que sur l’obtention d’une autre source d’énergie.

 

Richard Heinberg, Pétrole, la fête est fini ! – Avenir des sociétés industrielles après le pic pétrolier, pp. 67-68 et 73, 2008 © Demi Lune

 

 

 

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